Initiation du projet
Suite au lancement du concours d’idées « Envies d’Environnement » en 2000 par la Ville de Marseille, l’association Colinéo, sous son ancienne dénomination A.S.S.E.N.E.M.C.E. (Association de Sauvegarde des Sites et de l’Environnement au Nord-Est de Marseille et Chaîne de l’Étoile), s’est mise à la recherche d’un site propice à la sauvegarde et à la valorisation du patrimoine culturel, agricole et naturel sur Marseille. Après différentes investigations menées par l’actuelle Présidente, Monique BERCET et le Responsable Scientifique du projet, Henri SANDOZ, Phytoécologue et Enseignant-Chercheur à l’Université Aix-Marseille, leur choix s’est porté sur les derniers vestiges d’une ancienne propriété agricole nord-marseillaise, en continuité avec l’espace naturel proche de la Chaîne de l’Etoile : le Domaine de Party.
Le Domaine de Party
D’après le « Tout Marseille » de 1920, le Domaine agricole de Party comportait 100 hectares plantés en cultures maraîchères, céréalières, viticoles et horticoles (principalement glaïeuls, vignes et oliviers sur les pentes les moins fertiles). Ce domaine s’ordonnait autour d’une bastide, sur le modèle des anciennes villas romaines, toujours présente à l’heure actuelle, encerclée par les constructions nouvelles. Exposée au sud et protégée du mistral par la colline, la partie du domaine que nous connaissons aujourd’hui était irriguée par système gravitaire. Le terrain était parcouru de rigoles alimentées par une série de bassins en amont qui ont maintenant laissé la place aux lotissements.
Château de Party 1939-1940. Collection photos Mr Arnaud
Abandonnée vers les le début des années 50, l’activité agricole laisse place à l’étalement urbain, et les terres arables sont petit à petit remplacées par la construction de villas individuelles puis de grands ensembles collectifs. Le terrain que l’ont connaît aujourd’hui traverse les trente glorieuses en l’état de « friche urbaine » où s’entassent encombrants et carcasses de voitures. L’imperméabilisation des sols, le ruissellement des eaux et les activités sauvages exercées sur le site ont progressivement eu raison des murs en pierres sèches qui, par manque d’entretien, se sont finalement partiellement effondrées.
Enjeux et développement du projet
Véritable insertion « verte » de 6 ha au milieu de la zone urbanisée de la Batarelle (ex-ZAC Batarelle, 13013 Marseille), le site du Conservatoire constitue une inclusion locale de la « Chaîne de l’Étoile et du Massif du Garlaban » avec des enjeux de conservation exceptionnels. En effet, cet îlot naturel, extrêmement riche en biodiversité, se situe au centre de zones urbaines en progression depuis des décennies (près de deux millions d’habitants vivent autour sur le territoire de la Métropole Aix-Marseille-Provence). Or, par le passé, l’agriculture, le pastoralisme et l’exploitation des ressources minérales y ont été les principales activités, notamment sur leurs versants avec la culture en restanques (bancaous en provençal).
Face à ces constats, le projet de « Conservatoire des Restanques, Verger et Jardin Méditerranéen » a été initié et différentes études techniques et scientifiques ont été réalisées sous la direction du Professeur Henri SANDOZ et du phytoécologue Guy AUBERT. On notera notamment une étude de faisabilité en 2001 et une étude d’aménagement en 2003, à l’appui desquelles ont pu être obtenus en 2010 et 2011, les deux baux emphytéotiques avec la copropriété de la Batarelle II et la Ville de Marseille. Colinéo s’est également assuré de la préservation des lieux pour l’avenir en demandant le classement intégral du site en zone agricole au Plan Local d’Urbanisme de la Ville de Marseille.
Le Conservatoire des Restanques aujourd’hui
De la constitution du « Comité de suivi » du Conservatoire en 2009 jusqu’à la conception de la structure qui accueillera le public sur site en 2014, en passant par la signature des baux emphytéotiques en 2010 et 2011, l’association Colinéo n’a pas ménagé sa peine.
Elle poursuit
désormais ses efforts pour développer les différentes entités constitutives du
Conservatoire :
Le potager, ses légumes oubliés et le Jardin d’herbes aromatiques
L’objectif de cette entité est de remettre au goût du jour les légumes méditerranéens anciens, cultivés autrefois mais négligés de nos jours au profit de variétés plus rentables. La culture en terrasses est un mode ancestral de production mesurée, raisonnée, à l’origine de produits de très haute qualité. Ce patrimoine paysager et agricole doit être transmis aux générations futures. C’est pourquoi, malgré leur état de conservation remarquable pour leur ancienneté, nous avons fait restaurer une grande partie de ces bancaous pour qu’ils retrouvent leurs potentialités et permettent un redémarrage rapide des cultures.
Afin de poursuivre la démarche de qualité environnementale développée dans tout le projet du Conservatoire, les cultures ont été développées en suivant les préceptes de l’agriculture biologique et au-delà ; aucun produit phytosanitaire utilisé, irrigation au goutte-à-goutte, paillage des cultures, semences AB… La vente de ces légumes de haute qualité environnementale suit également cette recherche de l’exemplarité environnementale. Elle est donc organisée directement sur le site pour favoriser les circuits courts, directement du producteur au consommateur.
En outre, un jardin d’herbes et de senteurs, en cours d’achèvement, a été initié sur une restanque. Il a été planté des espèces aromatiques les plus communes en Provence mais aussi de certaines variétés plus rares dont l’utilisation se raréfie. Son agencement a en outre été conçu de façon à éveiller les sens des visiteurs tout en tenant compte des périodes de sécheresse estivale et des périodes de restriction concernant l’utilisation de l’eau. C’est pourquoi, nous avons regroupé toutes les plantes vivaces nécessitant davantage d’eau afin de disposer d’un système sobre en termes de consommation d’eau.
Enfin, l’accessibilité de ce jardin des senteurs sera conçue pour permettre la visite par le plus grand nombre, y compris par les déficients moteurs et visuels. Ces derniers pourront ainsi y exercer leur goût, leur odorat et leur toucher sur une multitude de saveur, d’odeurs et de textures différentes.
Le verger et ses fruits oubliés
Les normes du marché actuel ont conduit à une standardisation des variétés fruitières. C’est pour remettre en valeur les espèces anciennes que nous avons choisi des variétés peu connues du public qui pourra découvrir des formes, des couleurs, des odeurs et des saveurs aujourd’hui perdues. Le verger provençal accueille déjà différentes variétés d’amandiers, de figuiers, de cognassier, de grenadier, de pistachier et de jujubier et sera enrichi dans les années à venir avec d’autres espèces : abricotiers, pruniers, cerisiers, pommiers, poiriers, plaqueminiers… Des plants nous seront également fournis par divers spécialistes de variétés anciennes, mais aussi par un réseau local de vergers de conservation et autres acteurs du secteur, tel que le Conservatoire Botanique National Méditerranéen de Porquerolles.
Le jardin méditerranéen et le jardin d’herbes (jardin des senteurs)
Déjà constitué des plantes les plus caractéristiques des espaces naturels proches (Romarin, Thym, Chêne kermès…), le jardin méditerranéen sera enrichi d’espèces plus rares rencontrées dans la Chaîne de l’Étoile et le Massif du Garlaban ou dans les espaces naturels typiques de la Basse Provence Calcaire : Genévrier oxycèdre (Cade), Genévrier de Phénicie, Olivier sauvage (oléastre), Caroubier, Euphorbe arborescente, Palmier nain… La présence sur le Conservatoire d’affleurements siliceux de poudingue permettra également de ménager un espace où seront représentées les espèces caractéristiques de la Provence Cristalline : Arbousier, Myrthe…
Le bâtiment bioclimatique
Sur un plan logistique, le bâtiment constitue une priorité d’aménagement du Conservatoire pour devenir le levier de développement des activités du site et pour poursuivre la pédagogie développée. Sa réalisation est attachée à un cahier des charges strict en termes de qualité environnementale. Il répondra ainsi aux exigences des quatorze cibles de Haute Qualité Environnementale (éco-construction, éco-gestion, santé, confort) et normes thermiques en vigueur, afin d’accueillir le public et de réaliser les activités projetées en s’appuyant sur un véritable bâtiment outil pour la sensibilisation aux constructions durables.
La première partie de notre structure sera réservée aux sanitaires extérieurs, à une salle de réunion ainsi qu’à une petite salle d’accueil et d’exposition pour disposer d’un lieu d’accueil avant la réalisation de la deuxième phase.
La seconde partie du bâtiment sera dédiée aux animations pédagogiques. Il s’agira d’un bâtiment simple, polyvalent pour accueillir toute la diversité des activités projetées (ateliers, travaux pratiques, expositions, débats, animations…) et accessible aux différents groupes accueillis, y compris les personnes à mobilité réduite.
La troisième partie du programme sera dédiée à l’accueil des visiteurs et des activités administratives de l’association en général. Ce bâtiment permettra de centraliser l’activité sur le site du Conservatoire et d’accroître l’efficacité de l’association.
Un effort particulier sera fait pour l’accessibilité handicapé et l’aménagement pédagogique relatif aux équipements permettant l’atteinte des différentes cibles énergétiques. Ainsi, à titre d’exemple, seront mis en avant les matériaux et la gestion énergétique déployée sur le chantier; la production d’énergie verte, les méthodes d’optimisation énergétique employées, les systèmes de récupération d’eau utilisée, mais aussi l’orientation des bâtiments pour la qualité de l’éclairage ou encore les précautions prises pour la qualité de l’air intérieur. Les principes de la Qualité Environnementale du Bâtiment seront mis en avant et permettront d’insérer notre projet de bâtiments dans nos programmes d’Éducation à l’Environnement et au Développement Durable.
Il s’agira d’une construction à ossature bois. Le choix du bois comme matériau permettra notamment d’optimiser les performances énergétiques du bâtiment, mais aussi de privilégier les énergies « grises » et de mettre en place un chantier sec et peu impactant pour l’environnement. La bonne tenue au feu, la grande souplesse architecturale, l’évolutivité ainsi que la réduction des exigences en termes de fondations font du bois un excellent matériau d’éco construction.